Les liens entre numérique et environnement ne sont pas très connus et paraissent abstraits pour beaucoup. Cependant, ces problématiques nous touchent tous à l’échelle individuelle et elles m’intéressent également au niveau professionnel.
Je souhaite notamment pouvoir recommander des pratiques responsables dans le cadre de mes formations et accompagnements en communication.
La semaine dernière, j’ai assisté à une conférence de Frédéric Bordage à Bidart. Frédéric Bordage est un spécialiste français du numérique responsable et anime des conférences sur pourquoi et comment être éco-responsable dans le numérique. Elle était très inspirante, voici donc un résumé !
I / Le constat
Frédéric Bordage a créé en 2004 la communauté Green IT qui est consacrée à l’informatique durable et il a mené de nombreuses enquêtes sur l’empreinte environnementale mondiale du numérique. La dernière enquête date de 2019. Le conférencier s’appuie sur celle-ci pour présenter un constat de la situation actuelle.
Quelques chiffres clés au niveau mondial :
- 34 milliards d’équipements numériques
- 4,1 milliards d’utilisateurs
- 4 % de l’empreinte écologique mondiale (si on prend en compte : les consommations d’énergie primaire, d’eau, d’électricité et les émissions de gaz à effet de serre)
- si le numérique était un pays, son empreinte carbone représenterait 2 à 3 fois celle de la France
L’intervenant revient ensuite sur les différentes parties qui composent l’architecture du numérique actuel :
→ les utilisateurs,
→ les centres informatiques qui hébergent des serveurs,
→ le réseau qui relie les utilisateurs entre eux et aux centres informatiques.
Dans la salle, nous sommes une très grande majorité à penser que les serveurs sont les plus gros polluants. “J’ai bien fait de venir !” souligne l’intervenant…
En effet, ce sont de loin les équipements des utilisateurs les plus pollueurs (entre 59% et 84% des impacts du numérique), suivi des réseaux et enfin des centres informatiques.
=> Avec l’apparition des forfaits illimités, l’accès permanent à la 4G (et bientôt 5G…), les équipements toujours plus performants, nous pouvons avoir l’illusion que le progrès est infini. Mais la fabrication et l’utilisation du matériel numérique nécessite des matières premières non renouvelables (comme le plomb et l’étain). Or, on estime que dans 30 ans les ressources seront épuisées !
II/ Les solutions
Après ces constats plutôt alarmants, Frédéric Bordage présente les solutions qui peuvent êtres mises en place à l’échelle individuelle, dans le monde professionnel et par les pouvoirs publics. Il est important de souligner que l’on ne prône pas un retour en arrière : il est question de mieux utiliser ce que l’on a aujourd’hui. Il parle de sobriété numérique.
Les leviers principaux
Voici quelques idées pour aller vers un numérique plus responsable :
- allonger la durée de vie des équipements (réparation, réemploi, acheter d’occasion, reconditionné),
- réduire le nombre d’équipements (mutualisation de certains services, ne pas céder au marketing),
- éteindre la box internet (la nuit, quand je pars au travail) et les autres équipements,
- limiter l’usage du Cloud, surtout en 4G,
- regarder la télé via TNT et éviter le streaming et la Vidéo à la demande (VoD).
Quelques idées reçues : utiliser un moteur de recherche alternatif et supprimer ses mails permet de réduire son empreinte carbone. Frédéric Bordage explique que ces actions ont un impact environnemental extrêmement faible voire nul…
L’éco-conception
L’expert explique également que les acteurs du numérique doivent être dans une démarche d’éco-conception : il s’agit d’un standard pour réduire les impacts environnementaux d’un produit ou d’un service. Dans le domaine du numérique, on ne peut pas écoconcevoir un logiciel (trop abstrait) mais on prend en compte tout ce qu’il y a autour de la création d’un logiciel, d’un site web, d’une application…
L’éco-conception prend en compte :
- les impacts de tous les équipements physiques (ordinateurs, réseau, serveurs…) à toutes les étapes de leur cycle de vie (fabrication, utilisation, fin de vie),
- les différents indicateurs environnementaux (émission des gaz à effet de serre, consommation électrique…).
Les professionnels du numérique doivent donc aller vers plus d’efficacité pour utiliser au mieux les ressources à disposition.
Le facteur 4
Enfin, pour être dans un numérique réellement durable (qui prenne en compte les 3 grands piliers du développement durable : l’humain, l’environnement, la rentabilité économique), il faudrait diviser par 4 nos impacts numériques actuels !
=> Il est donc possible d’agir pour avoir un numérique plus responsable qui utiliserait les technologies de pointe pour subvenir à nos besoins essentiels (plutôt que de servir nos loisirs).
=> Il y a 50 ans, la NASA a pu envoyer des hommes sur la lune avec des ordinateurs qui avaient… 70ko de stockage !
Pour mieux comprendre, cette image fait 70ko 🙂 👇
=> Les outils que nous avons aujourd’hui à disposition sont donc incroyablement puissants. A nous de les utiliser avec créativité pour avoir un impact positif.
J’ai apprécié la vision de Bordage qui est tournée vers la mise en place d’une sobriété numérique (à ne pas confondre avec une écologie punitive et régressive), l’utilisation intelligente de nos ressources et la coopération.
Et vous, quelles sont vos bonnes pratiques pour un numérique plus responsable ?